on en parle
Le choix du nom « bermuda » fait référence à l’expérience des soldats britanniques débarqués aux Bermudes, qui obtinrent de leur hiérarchie de couper leurs pantalons au-dessus du genou en raison de la chaleur. Le terme évoque ainsi non seulement l’importance du contexte, du lieu, du terrain, dans l’apparition des formes, mais aussi la nécessité de prendre en compte et de s’adapter aux spécificités de son environnement afin d’y évoluer au mieux. En ce sens, la manière dont le projet bermuda prend forme est fortement liée aux qualités propres du territoire dans lequel il s’inscrit : celui, complexe et atypique, de la frontière franco-suisse, dans le département de l’Ain. Particulièrement marquée par les inégalités de revenus, la pression foncière et la pénurie de lieux de culture et d’échanges, cette zone ne permet ni aux artistes de s’installer, ni au public d’avoir accès à une offre culturelle de qualité sans traverser la frontière. Ainsi le projet bermuda répond aux problématiques d’accès aux espaces de travail tout en décentralisant une production artistique, et des temps de monstration, de mise en partage de cette dernière, en dehors de Genève. Afin de déployer leurs pratiques et leurs activités, les membres de l’équipe bermuda privilégient ainsi des logiques d’ancrage et d’attachement au territoire qui les accueille. La démarche de l’équipe, qui a fait le choix d’acheter collectivement un terrain et d’y construire un bâtiment, s’inscrit en outre dans une temporalité pérenne. Ce choix pointe vers la possibilité d’autres économies de vie et de travail pour les artistes.
[Une initiative rédigée en collaboration avec Candice Savoyat, étudiante du Diplôme Universitaire Espaces communs (Yes We Camp en partenariat avec Ancoats, CoDesign-It et l’Université Paris Est, Marne-la-Vallée).]
bermuda est un lieu de recherche, de fabrication et de diffusion en arts contemporains qui se concentre sur la mise à disposition d’espaces et d’outils de travail artistique d’une part ; et la diffusion des pratiques artistiques contemporaines depuis le lieu et le temps de leur fabrication d’autre part. Le projet artistique de bermuda est fondé sur des temps de résidence, des compagnonnages et des workshops. Chacune des propositions est pensée de manière endogène à partir des enjeux qui sont ceux du lieu et de l’équipe au moment où elles se formulent.
Pensé à l’initiative de plusieurs artistes, le bâtiment qui abrite ces activités a été auto-construit par l’équipe de 2018 à 2021, à l’extrémité de la friche de l’ancienne gare de Sergy (01). Il se compose de quatre blocs : deux à usages privés et deux à usages collectifs, sous un grand toit de 1’300m2. Les espaces collectifs sont pensés pour accueillir des artistes dont les projets nécessitent des outils de fabrication artistique spécifiques et professionnels, ainsi que des résidences de recherche et de production. La configuration des ateliers favorise le partage des savoirs et des compétences : atelier de production (bois, métal, atelier de postproduction audio et vidéo…), espaces polyvalents (salle de réunion, bureau partagé) et des espaces de vie (cuisine, chambre accueillant des résidences). Les ateliers individuels comportent des espaces de vie qui inscrivent fortement les pratiques des résident·e·s permanent·e·s dans le quotidien du lieu.
La Petite Forêt est un projet de transformation d’une parcelle agricole jusqu’ici cultivée de manière conventionnelle en un projet agro-forestier sur une parcelle voisine des ateliers bermuda, acquise par la Commune de Sergy et mise à disposition de l’association sur une longue durée. Conçu dans une démarche de recherche, ce projet a pour but de mettre en pratique des formes alternatives de mise en culture, qui privilégient un rapport endogène au terrain et qui mettent en jeu le rapport comptable et de rentabilité que l’on entretient habituellement au vivant, en vue de créer un nouvel usage maraicher, vivrier et collectif de la parcelle. La Petite Forêt rassemble les acteurs de bermuda, la mairie et des parties prenantes extérieures, venant d’horizons variés : artistes, producteurs·trices locaux·ales, paysagistes, chercheurs·euses, habitant·e·s. Ensemble, avec leurs pratiques et leurs usages, en s’inspirant d’autres exemples d’agriculture exploratoire et en étudiant le terrain sous différents aspects (microbiologique, artistique, botanique), iels conçoivent ensemble la métamorphose paysagère, relationnelle et architecturale de ce lieu.